Chansons d'ici

 

Au cours des décennies, Nana a souvent traversé l’Atlantique pour venir chanter pour nous. À chaque fois, les Québécois l’accueillaient et se laissaient charmer par ses chansons. De son côté, elle découvrait nos auteurs. Au fil de ses séjours, elle en a côtoyé plusieurs et a créé des liens. Après avoir fredonné leurs chansons, elle les a apprises. Voici les 16 titres qu’elle a enregistrés en français ou dans d’autres langues.

 

JEAN-PIERRE FERLAND

Jean-Pierre Ferland fut l’un de nos premiers chansonniers. Il débuta sa carrière en 1958. Au cours des années 1960, il fit beaucoup d’allers-retours entre la France et le Québec.

1) Je reviens chez nous (1985)

La veille de Noël 1966, seul à Paris, il aurait souhaité revenir chez lui et retrouver sa compagne. C’est alors qu’il composa un poème témoignant de son attachement à sa terre natale. En 1968, "Je reviens chez nous" vit le jour et devint très connue dans la francophonie.


Nana, qui l’entendait souvent à la radio, se disait émue autant par le texte que par la mélodie. Ainsi, trois ans plus tard, elle l’enregistra en anglais. Suite à son grand retour artistique en Grèce, en 1984, plus que jamais, Nana ressentit ce qu'est revenir chez elle. Comme cette pièce québécoise reflète parfaitement cette réalité, elle décida de la reprendre, cette fois, en sept langues. "Je reviens chez nous" est donc devenue la plus multilingue de son répertoire. L’enregistrement de Nana est sorti en single dans sept pays et "A place in my heart" (Une place dans mon coeur), en anglais, est la version la plus répandue. Nana et Jean-Pierre ont eu l’occasion de l’interpréter en duo à la télévision et sur scène. Les Québécois ont de quoi être fiers.

ROCH VOISINE

Roch Voisine, né au Nouveau-Brunswick, s’installa à Montréal lorsqu’il débuta sa carrière. Au début des années 1990, il était considéré comme l’idole de la nouvelle génération en France. Nana l’admire et a assisté à ses spectacles.


2) Dix-mille ans encore (1994)

En 1994, Nana réalisa l’un de ses souhaits en enregistrant l’une de ses compositions. Elle choisit "Waiting" (Attendre). Grâce au parolier, Jean-Guy Prince, elle est devenue "Dix mille ans encore". Dans les deux versions, le thème est le même : l’attente. Le texte anglais est conjugué au passé: "And I've been waiting. And I've been crying. And I've been loving, loving you." (Et j'ai attendu. Et j’ai pleuré. Et je t’ai aimé, aimé.) Le français, au futur: "Je t’attendrai dix mille ans encore et je t’aimerai de plus en plus fort." C’est au Québec que la chanson a connu le plus de succès. Nana l’a incluse dans la plupart de ses récitals. De plus, Roch et Nana l’ont chantée en duo sur scène à Paris et à Montréal.    

LEONARD COHEN 

Sur la scène internationale, Leonard Cohen est l’un des Québécois les plus célèbres. En plus d’être poète, il interprétait ses compositions. Nana a repris cinq de ses chansons et reconnaît dans ses textes une poésie, une philosophie comparable à celle de Nikos Gatsos. Les deux s’étaient liés d’amitié et avaient un respect mutuel pour leur Art. C’est pourquoi chacun interprétait ses chansons à sa façon, selon l’émotion qu’elles suscitent.


3) Suzanne (2002)

Avec Leonard Cohen, il est parfois difficile de savoir ce qu’il pensait en écrivant un texte, surtout lorsque c’est une traduction. "Suzanne" fut son premier succès, en 1967, lorsque le poète devint l’interprète. Ici, il fit le portrait d’une femme qui vit près d’un fleuve et qui inspire l’amour. D’après une entrevue, l’auteur a reconnu qu’il s’agissait de Suzanne Verdal, l’épouse du sculpteur Armand Vaillancourt. Le texte suggère une rencontre fusionnelle entre deux esprits. Nana l’a enregistrée en français. En 2002, en solo et en 2011 en duo avec celui qui l’a traduite, Graeme Allwright.

4) The guests (1980)

"The guests" (Les invités) nous parle d’un hôte qui entraîne ses invités dans une fête et personne ne sait où va la nuit ni pourquoi le vin coule. À chaque refrain, on entend dire à répétition: "Oh Love, I need you" (Ah mon amour, j'ai besoin de toi). Le texte a été compris de plusieurs façons. Mais l’auteur a précisé qu’il a un côté sombre. Les invités sont en fait des âmes naissantes isolées et l’hôte est le responsable de cette catastrophe. Qui sait comment Nana perçoit cette chanson? Chose certaine, son enregistrement est tout à fait réussi. Et, l’interprétation qu’elle en faisait sur scène lui méritait une ovation à chaque fois. Une version a été faîte en allemand. Elle s’intitule "Das Fest" (La fête).

5) La ballade du chien-loup (1982)

"La ballade du chien-loup", parue en 1982, a inspiré le titre de l’album "Ballades". C’est la première adaptation de Nana en français d’une oeuvre de Cohen. Elle raconte l’histoire d’un chien-loup qui cherche désespérément sa mère. Pendant six minutes, on se laisse bercer par la poésie au gré de la voix de Nana. Il faut l’écouter pour en saisir toutes les nuances. La version originale, "Ballad of the absent Mare" (Ballade de la jument absente) parle d'un cow-boy dont le cheval s'est enfui.

6) You know who I am (duo avec Graeme Allwright) (2004)

Graeme Allwright, un inconditionnel de Leonard Cohen, a traduit et enregistré plusieurs de ses chansons en français. Cette fois, il s’est lancé dans la langue de Shakespeare en duo avec Nana. Ensemble, ils ont enregistré deux versions de "You know who I am" (Tu sais qui je suis): l’une qui commence avec Nana et l’autre avec Graeme. Dans son texte, l’auteur raconte à son amoureuse qu’il est celui qui est la distance entre tous les moments qu’ils seront. On peut imaginer le visage de Nana lorsque Graeme lui chante: "Sometimes I need you naked. Sometimes I need you wild." (Parfois, j'ai besoin de toi nue. Parfois, j'ai besoin de toi sauvage). Elle, si pudique. Enregistrée en 1973, la chanson n’a vu le jour qu’en 2004, dans son intégrale française et sur son CD de chansons canadiennes.

7) Hallelujah (2018)

"Hallelujah" est incontestablement la chanson la plus célèbre de Cohen. Depuis sa sortie en 1984, elle a été reprise des centaines de fois à travers le monde, en anglais et dans d’autres langues. Entre temps, l’auteur a modifié les paroles originales. Si au départ, c’était un désir d’affirmer sa foi avec émotion, on croit aussi que c’était une façon d’évoquer la sexualité à travers la poésie. Peu importe! Si vous aimez les mélodies émouvantes et pleines de vibrations, écoutez "Hallelujah".

 

DANIEL LAVOIE ET LOUISE FORESTIER

Daniel Lavoie, auteur-compositeur-interprète franco-manitobain, est surtout célèbre pour sa participation à la comédie musicale "Notre-Dame de Paris". Louise Forestier, chanteuse et comédienne, a débuté sa carrière avec "L’Osstidcho", un spectacle musical qui a marqué l’histoire culturelle du Québec.


8) Cette chance-là (2002)

En 2002, tous deux ont uni leur talent pour créer une chanson destinée à Nana. Daniel, pour la musique, et Louise, pour le texte. Le titre: "Cette chance-là". C’est une mélodie simple et agréable à entendre. De plus, la chance est un thème que Nana connaît très bien. À plusieurs occasions, elle a su la reconnaître. Aujourd’hui, elle est reconnaissante à la vie pour tout ce qu’elle lui a apportée. Comme elle chante, c’est la beauté du hasard lorsque la chance se présente.

 

GILLES VIGNEAULT

Gilles Vigneault est à la fois chansonnier, compositeur, poète et conteur. Il était le deuxième, après Félix Leclerc, à tracer la voie aux artistes québécois vers la France. Nana l’admire beaucoup et l’a déjà croisé sur les plateaux de télévision.

 


9) Entre musique et poésie (duo avec Gilles Vigneault) (2010)

En 2010, pour les besoin d’un album de duos, Gilles Vigneault invita 15 artistes, dont Nana, à chanter avec lui. Plutôt que de reprendre un de ses titres connus, ils ont choisi une de ses nouvelles chansons: "Entre musique et poésie". Le refrain va comme suit: "Hiver comme été, tout me recommence. Au fond d’un silence, je trouve à chanter". Le duo d’une durée de six minutes est interprété avec brio.

SOEURS MCGARRIGLE

Kate et Anna McGarrigle sont de descendance irlandaise. Elles jouent divers instruments et chantent en anglais et en français. Qu’on aime ou non, personne ne peut nier leur versatilité et l’originalité de leurs compositions. C’est sans doute ce qui a poussé Nana à enregistrer quatre de leurs chansons.


10) Gedanken lesen (1979)

En 1979, Nana enregistra une première chanson des Soeurs McGarrigle en allemand: "Gedanken lesen" (Lire les pensées). Pour ceux qui ne comprennent pas la langue, voici une synthèse: Un jongleur, sous les projecteurs, peut lire dans les pensées. À travers ses gestes, il lui dit de prendre du temps pour vivre chaque petite chose. Celle-ci, enregistrée sur une musique légèrement tropicale, n’a rien à voir avec les versions popularisées par Kate et Anna: "Avant la guerre" et "Sun, Son (Shining on the water)" (Soleil, fils brillant sur l'eau).


11) On my way to town (1982)

Avec seulement deux guitares et un violon, la voix paisible et rassurante de Nana nous entraîne sur son chemin: "On my way to town, until I get there, I won't turn around. I'm dropping pebbles in my tracks. I will not get lost when I come back." (En route vers la ville, jusqu'à ce que j'y arrive, je ne me retournerai pas. Je laisse tomber des cailloux sur mes traces. Je ne me perdrai pas à mon retour.) C’est surtout au Canada que Nana a chanté "On my way to town". D’ailleurs, en 1982, c’est avec cette chanson qu’elle débutait ses récitals. En vue de sa tournée d’adieux, en 2006, elle en a fait une version grecque intitulée "Moni perpato" (Je marche seule). Kate et Anna l’ont enregistrée en français: "Cheminant à la ville".

12) Mississippi blues (1982) 

La même année, "The work song" (La chanson du travail), popularisée par le célèbre duo, est ajoutée au répertoire de Nana. Composée sur un air gospel, elle rappelle avec entrain le quotidien d’autrefois des Afro-Américains. Le texte français, "Mississippi blues", ressemble à l’original. Son refrain mentionne qu’ils se cassent le dos à force de creuser des trous. Le maître a le maïs et l’esclave, le bambou. Ils vivent courbés, mais ils chantent debout. En allemand, "Alltagslieder" (Chansons de tous les jours) raconte que parfois, à la radio, tu entends d’anciennes chansons sur le mal du pays et tout te revient à la mémoire.


13) L’amour, qu’est-ce-que c’est? (1986)  

Au cours de la saison 1986-1987, Nana reprenait un quatrième titre des Soeurs McGarrigle. En anglais, "Love is" (L'amour c'est). Celui-ci raconte que l’amour peut se matérialiser sous différentes formes et se manifester de différentes manières. Le mien est précieux, ne s’explique pas et a franchi les limites, chante-t-elle. En français, le titre apparaît sous forme de question: "L’amour, qu’est-ce que c’est?". Le texte propose d’autres exemples de l’amour. Le refrain donne la réponse: L'amour, c'est moi multiplié par toi.

GENE MACLENNAN

Gene MacLellan est un auteur-compositeur d’origine anglophone ayant vécu une grande partie de sa vie au Québec. Il a entre autres écrit "Snowbird" qui a lancé la carrière d’Anne Murray.


14) Mets ta main dans la main (1971)

Après le succès international de "Put your hand in the hand", en 1971, Nana décida de la reprendre. Elle demanda aussi à son parolier Pierre Delanoë de la traduire en français. Celle-ci devint "Mets ta main dans la main". Malgré la douceur de Nana à l’interpréter, on reconnaît le rythme gospel. De plus, le champ lexical est lié à la religion. En anglais: l’homme de Galilée qui a calmé la mer et le livre sacré. En français: le ciel, la croix et le Cantique des Cantiques. La version originale a été popularisée par les plus grands interprètes dont Anne Murray et Elvis Presley. Les deux enregistrements de Nana sont sortis en 45 tours dans neuf pays.


AUTEUR INCONNU

15) Le curé de Terrebonne (traditionnel) (1975)

Nana a découvert cette chanson traditionnelle lors de ses premiers passages au Québec. Ce n’est que bien plus tard qu’elle l’a enregistrée. En cherchant sur Internet, on apprend qu’il existe une version française portant le titre "Le curé de Pomponne". Selon le site officiel de la commune, elle serait attribuable au chansonnier et dramaturge Jean-Joseph Vadé (1719-1757). Comme plusieurs de nos chansons folkloriques ont des origines françaises, on pourrait penser que c’est le cas ici. Mais le nom "Terrebonne", ville en banlieue de Montréal, nous confirme qu’il s’agit de l’une de nos chansons, qu’elle soit adaptée ou originale.

Nana a eu du mal à l’apprendre, car il faut suivre le tempo en articulant bien les mots. Lors de son spécial télé "Numéro Un" de 1975, elle apparaissait agenouillée devant le prêtre, l’humoriste Claude Vega. Vêtue d’une robe blanche, ses cheveux étaient attachés avec des rubans roses. Sur scène, elle la présentait en évoquant le Québec et l’interprétait avec son batteur, Bernard Papillon.


ANTOINE GÉRIN-LAJOIE

Antoine Gérin-Lajoie (1824-1882) a été une figure canadienne française marquante du 19e siècle puisqu’il a été poète, avocat et romancier.


 

16) Un Canadien errant (1966)

C’est à lui que l’on doit la complainte "Un Canadien errant" qui évoque la déportation de l’un des Patriotes de 1837-1838. Ceux-ci s’étaient rebellés contre la diminution du pouvoir des francophones. Au cours des décennies, elle apparaissait dans nos cahiers de chansons. On l'enseignait à l'école et on la chantait en famille.

Lors de sa première tournée avec Harry Belafonte, à l'automne 1964, Nana fit connaissance avec le duo anglo-canadien Ian & Sylvia Tyson qui lui recommanda d'interpréter cette chanson dans ses spectacles au Québec. Nana l’a écoutée et s’est laissée émouvoir par la mélodie et le texte. Malgré la réticence de sa compagnie de disques, elle l’a intégrée à son répertoire. Elle créa alors un sentiment d'appartenance avec le public québécois. Aussi, Nana a souvent choisi de clôturer ses récitals en l'interprétant a capella.

QUÉBÉCOISE

Pour conclure, il convient de rappeler que Nana a déjà déclaré que les artistes québécois ont beaucoup apporté à la Chanson française. Les gens d’ici pourraient en dire autant à son sujet. Ils sont même fiers qu’elle ait mis sa voix sur plusieurs de nos mélodies. Avec tous les liens créés avec notre culture, Nana a de quoi se sentir Québécoise.